Fut un temps…
Fut un temps où je vivais dans l’un-sous-science…
Entre mes doigts se glissait l’accoutumance
Croyant que fumer était une délivrance.
Avec les alcools, j’eus trop de chance,
Car malgré un bon degré d’appétence,
Je n’atteignis jamais la vile dépendance.
Feu ma jeunesse et ses années d’enivrance !
Elles ne m’ont point conduit à la triste déchéance.
J’avais, intimement, du risque, une saine conscience,
Sans même en avoir acquis une véritable connaissance.
Fut un temps où les récurrentes soirées étaient sans fin :
Il fallait bien boire puisqu’étaient tirés les si bons vins,
Faire la grosse fiesta comme si tout allait très bien ;
Les champs des possibles étaient dans nos mains.
Mais quand venait les ombres des petits matins
Il fallait broyer du noir en maquillant le festin.
Les nuits si blanches s’enchaînaient sans frein
Bien plus belles que l’aï1 gris des lendemains.
Il me semblait que c’était mon seul destin
De vivre dans les eaux troubles du rien.
Fut un temps où des gens de passage
Squattaient ma demeure, mon paysage.
Nous marchions dans les – pas sages – pas
Des uns des autres, pour vérifier si l’adage,
A contrario, la jeunesse forme les voyages.
Nous croyions aux paradis, aux mirages.
Comme si le ciel n’avait pas de nuages.
Comme si n’existaient pas les orages.
Nous étions juste des êtres sans rivage,
Perdus aux confins de nos âmes sans âge.
Fut un temps où les chemins sinueux de la vie
Nous séparâmes. On se pensait être de vrais amis
Mais nous n’étions que des grandes solitudes réunies.
Les années passèrent… Du travail… ou pas et de l’ennui,
Des amours-désillusions, des aléas heureux, des soucis…
Des peines mais aussi des joies, de beaux enfants aussi !
Et parfois, on se permit un p’tit ou un gros grain de folie
Pour dépasser le passé simple et la sinistre mélancolie.
Mettre un peu de piment dans nos cœurs et nos lits
Pour surtout ne pas ressembler à un vieil aigri !
Fut un temps où on dépose son existence,
Penser à l’instant de tirer sa révérence.
Puis, on oublie, on feint l’indifférence.
On se rattache ou pas, à des croyances.
NON, on est encor jeune, vive la défiance !
Tout n’est pas déjà fini ! Alors tout commence
Le jour où on comprend qu’in fine nos airs rances
Ne conduisent plus un fol bolide mais une ambulance.
Il faut changer de rôle afin de perpétrer les réjouissances.
Redevenir celui que l’on a trahit, retrouver la part d’enfance.
Fut un temps où vient à point le printemps du renouveau.
C’est maintenant qu’il faille choisir de sauver sa peau
Ou périr, à petit feu, à bout de souffle, d’une B.P.C.O.
C’est le moment d’échanger nos horribles oripeaux
Contre les habits de lumière et les chauds bravos.
S’offrir le luxe du plus magnifique des cadeaux :
L’achat d’un « paquet » autrement plus rigolo,
Pour exécuter enfin le triple grand (sur) saut
Adieu, toi, l’ultime et ridicule vain mégot !
Vraiment sans rancune. Bello ciao !
Chriss Brl
Nota bene : poème publié initialement sur mon site de défume : https://je-defume.info/fut-un-temps/