Blackface : un blanc parle aux blanc.he.s…(et pas que…).
Avertissement. Je tiens à préciser que j’ai rédigé cet article plutôt à l’attention des blanc.he.s. car, d’une part, je n’ai aucune légitimité à parler pour et à la place des noir.e.s (ou tout autre personnes dont la couleur de peau diffère de la mienne – ce qui ne les exclut pour autant, bien au contraire) et d’autre part, parce que je me heurte trop souvent, face à mes homonymes leucodermes, au refus d’entendre, de comprendre, d’admettre ce que je tente de leur expliquer quant au racisme institutionnalisé, au privilège blanc1…. Mon propos découle de mes recherches sur les problématiques raciales en lien direct avec les concerné.e.s.
Je ne cherche que la vérité, la justice. Et remettre, par là-même, quelques pendules à l’heure…
Par ailleurs, je rappelle, pour mes connaissances (ou pas), que le fait d’avoir des enfants métis, des ami.e.s noir.e.s,…ne me (nous) préserve pas d’être raciste (le racisme n’est pas une opinion mais un délit).
En général, j’écris sur l’actualité un certain temps après les faits car réagir à chaud et donc dans la précipitation ne (me) permet pas d’avoir assez de recul pour bien analyser une situation (et ça m’évite – en principe – d’écrire des conneries). Cette fois, je vais faire exception à ma règle. Facile, c’est un sujet que je suis depuis quelques années : j’attendais juste le moment opportun pour en parler. Qu’est-ce donc ? La Blackface ! En effet, je profite que le joueur de foot Antoine Griezmann ait posté une photo sur Twitter, déguisé en basketteur des années 1980, pour rendre hommage (selon lui) aux Harlem Globetrotters. Si cela n’était que ça, c’eut été réussi ! Mais il s’est entièrement maquillé en noir avec perruque afro et le voilà dans la posture typique de cet acte raciste. Oui, c’est un acte raciste.
Voilà, j’ai dit le mot qui fâchent la majorité de mes congénères blanc.he.s ! Pourquoi ? Parce que, selon eux/elles, ce n’est qu’un déguisement, une distraction (c’est pour rire) ; d’autant plus qu’il n’avait pas, a priori, de mauvaises intentions. C’est donc insignifiant, anecdotique. Pas de quoi polémiquer ! Cependant, c’est bien mal connaitre l’origine de la Blackface…
En effet, cette pratique fait référence à l’esclavage des noir.e.s2. Au XIXe siècle, aux Etats-Unis, des blancs se grimaient ainsi lors de spectacles soi-disant comiques afin de caricaturer de manière discriminante, méchante, ridicule, les personnes noires (en les faisant passer pour ignorants, paresseux, voleurs et menteurs) devant un parterre exclusif de blanc.he.s hilares. Bien que le terme soit importé des USA, la pratique existe aussi et encore actuellement en Europe (France, Belgique, Pays-Bas…) à titre individuel mais aussi dans une dimension collective lors de fêtes traditionnelles.
Indépendamment de l’aspect historique, il est utile de préciser qu’il n’est pas juste question de se déguiser. Cet acte est raciste car son auteur.e se maquille/se peint le corps en noir (en y ajoutant presque toujours des stéréotypes : postiche crépu, dessin de lèvres charnues…) ; or, la couleur de peau n’est pas un déguisement, on ne peut la changer. Comprenez bien qu’un.e noir.e qui se grimerait (j’écris au conditionnel car personne ou presque ne le fait) n’aurait pas du tout la même symbolique : a contrario, cela ne serait pas lié à l’oppression des blancs (violence, discrimination à l’embauche, au logement…).
Peut-être aussi que les noir.e.s existent par eux.elles-même sans avoir besoin de se déguiser ?
La Blackface fait partie d’un ensemble de pratiques et de discours négrophobes, que ce soit à titre personnel ou institutionnel. Elle porte atteinte à l’individualité et à la collectivité noires, en déshumanisant, infantilisant ces personnes. On peut aussi faire un parallèle avec les sketchs de Michel Leeb. Peut-être est-il temps de combattre l’ignorance (c’est l’excuse, le prétexte qui revient dans les conversations) par l’éducation (scolaire) ?
Vous objecterez que des noir.e.s ne voient pas non-plus où est le problème : certes mais je ne répondrai pas à leur place. Je sais juste que les concerné.e.s n’ont pas toujours conscience d’être victime.
Si je me permets de réagir sur ce sujet, c’est parce que les blanc.he.s, en majorité, ne sont toujours pas prêt.e.s à entendre les revendications des noir.e.s (et autres racisé.e.s). De plus, je ne veux pas / plus être caution et partie prenante d’un système et d’une pensée raciste. Néanmoins, ne cherchez pas à me mettre dans la case des antiracistes, des gauchistes…, bien que mes idées puissent s’apparenter parfois à leur discours, je n’entre dans aucune case ! Je n’ai pas de parti pris et ne cherche à plaire à personne.
Chriss Brl
1 – Mes articles en lien avec ce thème : ici, ici et là.
2 – Dans la bouche de la plupart des blancs, dire « noir » semble leur faire peur comme si ça mettait une distance. Ils disent donc « black » car ils pensent que c’est créer une proximité et que c’est cool. Ils pensent que « noir », c’est un gros mot. Ils se trompent bien sûr. À noter également, que « noir » ne prend pas de majuscule à l’instar de blanc.
Le 20/12/2017 – © chridriss